
En avant Moris (EAM), parti d’opposition non représenté à l’Assemblée législative, est venu de l’avant avec quatre propositions pour réclamer que le projet de loi sur l’immigration à Maurice soit complètement repensé. Plutôt que des pouvoirs discrétionnaires à un ministre, EAM suggère l’institution d’un tribunal pour résoudre les litiges éventuels en matière de citoyenneté, d’accès au territoire et de déchéance de nationalité. Et le mouvement préconise l’octroi de la nationalité de facto aux parents étrangers d’un enfant Mauricien, invoquant la nécessité de garantir les droits de l’enfant à disposer de ses deux parents surtout dans l’éventualité d’un divorce. La surprise est de taille venant du monde politique : un parti d’opposition qui fait des propositions !
La question de la citoyenneté entraîne de trop graves conséquences sur le destin des individus que le mouvement EAM préconise qu’elle soit soustraite aux considérations politiques et que les décisions en cette matière soient d’ordre juridique. Aruna Pulton, la vice-présidente de l’organisation, suggère l’institution d’une commission juridique pour examiner les dossiers de régularisation des titres de séjour car, dit-elle, les fonctionnaires du bureau de l’immigration n’ont pas la formation légale adéquate pour mener à bien cette fonction.
Elle suggère, en outre, l’institution d’un tribunal pour examiner les cas litigieux. « Un tribunal dédié aux questions de la citoyenneté au niveau de la cour intermédiaire devrait nous permettre de déterminer rapidement les cas et les personnes qui ne seraient pas satisfaites peuvent toujours recourir à l’instance suprême pour faire appel », dit-elle.
Patrick Belcourt, le leader d’EAM, invoque la notion de séparation des pouvoirs pour réclamer l’abolition des pouvoirs discrétionnaires au ministre chargé du dossier de l’immigration. « Il n’est pas normal qu’un ministre puisse décider du statut d’un citoyen ou d’un étranger sans qu’il n’ait de compte à rendre à l’Assemblée législative et sans que la personne intéressée ne puisse recourir en justice », dit-il. A première vue, cela relève du bon sens. Mais, il montre facilement que le projet de loi s’est considérablement éloigné du bon sens.
Patrick Belcourt pointe du doigt certraines dispositions comme les individus qui pourraient être qualifiés de subversifs non seulement par Maurice mais par des pays considérés « amis », la présomption d’activités de prostitution sur la base de préjugés élevés au rang de « suspicions raisonnables ». Il fait aussi remarquer que l’Etat mauricien entend poursuivre sa politique discriminatoire à l’encontre des personnes séropositives. Et enfin, il montre les dispositions qui donnent les pleins pouvoirs au ministre d’agir sur la base de renseignements et de conseils pour expulser ou refouler, non seulement des individus, mais aussi des catégories qui, selon le titulaire, seraient nuisibles à l’ordre public.
Donc, moins de politique et plus de juridique ? « C’est bien de cela dont il est question », nous répond-il. Le leader d’EAM a beau être lui-même un homme politique, il se pose fermement contre la conception des ministres omnipotents. L’initiative est surprenante, mais nous n’allons pas bouder notre plaisir. A part Rezistans ek Alternativ, les partis d’opposition se cantonnaient jusqu’ici à la critique et n’avaient rien à proposer.
(vidéo de Top FM)
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